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...tribulations d'une accro du Mexique

18 Jun

L'effet papillon

Publié par Héléna Verdier  - Catégories :  #papillon monarque, #michoacan, #valle de bravo, #migrations

« La Cigale, ayant chanté tout l'été, se trouva fort dépourvue quand la bise fut venue. » Le papillon monarque, lui à l’approche de l’hiver, ne va pas quémander chez la fourmi, qui de toutes façons n’est pas prêteuse (c’est une vieille embêteuse), mais met les voiles vers le sud !

Le papillon monarque est célèbre pour sa grande migration chaque année du Canada, de la région des Grands lacs vers les montagnes du centre du Mexique où il arrive en novembre, puis en mars de retour vers le Canada. Cette migration est particulièrement notable car c’est en groupe de millions d’individus qu’ils font le voyage. Ainsi, comme des milliers de retraités nord-américains, le papillon monarque s’envole vers le Mexique pour y passer l’hiver. Direction le Michoacán et l’État de Mexico, vers ce qui est devenu aujourd’hui un sanctuaire. Ce trajet leur prend plusieurs mois et c’est une seule génération de papillons qui fera tout le voyage. Ensuite, une fois arrivés à destination, ils se mettent en diapause, une sorte d’hibernation au cours de laquelle leur métabolisme est ralenti jusqu’à la fin de l’hiver. Cette grande migration est toujours aussi spectaculaire que mystérieuse puisque les scientifiques ignorent encore comment les papillons se repèrent sur le chemin pour retourner toujours aux mêmes endroits des générations plus tard. Pourquoi le Mexique me direz-vous ? J’ai bien quelques idées en tête comme l’excellente cuisine, la musique, la téquila, mais en fait c’est parce que le papillon monarque vient vivre pendant tout l’hiver dans les forêts d’oyamel, un sapin sacré qui pousse dans les montagnes du centre du pays. Ils s’y regroupent agglutinés en essaims de milliers de papillons pour se réchauffer et ils sont tellement nombreux que leur poids fait ployer les branches. À mesure que la journée avance et que l’air se réchauffe, ils s’envolent pour aller boire et butiner, puis reviennent sur leurs branches. Au début de l’hiver ils montent très en altitude (plus de 3500 mètres), puis à mesure que la saison avance, ils redescendent.

L'effet papillon
Des nuées de papillons

Des nuées de papillons

Pour avoir la chance d’observer ce phénomène absolument époustouflant, il faut donc se rendre dans les réserves du papillon monarque. Ce sanctuaire est à cheval sur l’état du Michoacán et l’État de Mexico. De nombreuses agences proposent des tours à la journée au départ de Mexico, mais il ne faut pas manquer cette occasion de connaître ces régions au cœur du pays et d’y passer quelques jours. Dans l’État de Mexico, on peut séjourner dans la petite ville de Valle de Bravo, une jolie ville sur le bord d’un lac, lieu de villégiature de la bonne société Mexicaine qui s’y retrouve les week-ends. Valle de Bravo se trouve juste à côté de Toluca, à une heure et demie de bus de Mexico, mais l’arrivée aux abords de la ville est véritablement magique. Imaginez une minute que vous êtes dans un bus plus ou moins bringuebalant, avec de la musique à fond, vous roulez dans la montagne au milieu des sapins, et soudain, alors que vous redescendez vers la ville, le bus ralentit, s’arrête presque, et moment de grâce, le bus est entouré de papillons monarques. D’abord un, puis deux, puis des centaines qui volent à côté du bus. Cela dure quelques minutes, mais le temps s’arrête.

L'effet papillon

La petite ville est très agréable et propose des hébergements vraiment bon marché et très propres dans le centre (autour de 18 euros la nuit). Il est donc très agréable d’y passer 48 heures, le temps d’aller voir les papillons et de flâner en ville en écoutant les oiseaux et en dégustant une délicieuse paleta glacée. Une des réserves (Piedra herrada) se trouve juste à la sortie de la ville, un taxi vous prendra environ 100 pesos (environ 6 euros) pour vous y emmener. Le spectacle se mérite, il faut faire une petite grimpette d’une demi-heure à une heure pour atteindre le lieu où se trouvent les papillons. On peut monter à pied ou louer un petit cheval. Histoire de ne pas laisser sur place notre guide qui n’aurait jamais pu me suivre, j’ai préféré pendre un cheval. Pour la visite, on est accompagné par un guide qui s’assure que l’on ne s’approche pas trop, que l’on ne dérange pas les insectes et qui vous explique des tas de choses. En y allant le matin, on peut observer les essaims, tout est calme et on peut entendre le léger bruissement des ailes des papillons qui volent autour. Pour les voir plus actifs, il faut s’y rendre l’après-midi, quand les papillons commencent à se réchauffer et à s’envoler.

Le lac de Valle de Bravo

Le lac de Valle de Bravo

L'effet papillon
L'effet papillon
Le centre de Valle de Bravo
Le centre de Valle de Bravo
Le centre de Valle de Bravo

Le centre de Valle de Bravo

Des essaims de papillons

Des essaims de papillons

La réserve de Piedra Herrada
La réserve de Piedra Herrada
La réserve de Piedra Herrada

La réserve de Piedra Herrada

Les réserves ouvertes au public les plus connues et les plus fréquentées se trouvent dans le Michoacán. Le Michoacán est un état absolument magnifique, et bien que je sois incapable de choisir ma région préférée du Mexique, j’ai un très sérieux penchant pour cet état. C’est un peu plus loin de Mexico (3 ou 4 heures) mais cela en vaut la peine. Je vous parlerai plus en détail de cet état dans un autre billet, mais en bref, on peut dire que c’est une région rurale, très indigène, malheureusement très méconnue. Elle est jalonnée de lacs, de montagnes, de villes coloniales superbes, de villages tarasques et on y mange divinement... mais nous y reviendrons (et j’y retournerai ça ne fait aucun doute). En plus de tous ces atouts et d’un patrimoine culturel très riche, le Michoacán est également le refuge de millions de papillons monarques. On peut tout à fait poser ses valises à Morelia, la capitale de l’état, mais le mieux si l’on souhaite vraiment connaître la région, c’est d’aller jusqu’au village d’Angangueo. Ce magnifique petit village est littéralement niché dans la montagne. Son emplacement sur les flancs de la montagne le rend toutefois vulnérable aux inondations et aux glissements de terrains et lorsque nous nous y sommes rendus en 2011, la population avait malheureusement subi de lourdes pertes matérielles et humaines un an plus tôt et avait de grandes difficultés à s’en remettre. Une raison de plus pour y passer au moins 48 heures et faire vivre ce village qui compte cruellement sur le tourisme.

L'effet papillon
L'effet papillonL'effet papillon
Angangueo

Angangueo

L'effet papillon

Pour aller voir les papillons il existe plusieurs solutions, un taxi privé depuis le village, un tour guidé (souvent très cher et les personnes qui vous accostent dans la rue sont du genre persévérantes, si vous n’êtes pas intéressé ne vous laissez pas avoir à l’usure), ou le colectivo. Le colectivo est en fait un pickup amélioré avec des bancs à l’arrière et une bâche pour la pluie et c’est de loin la solution la moins chère. Le chauffeur fait quelques rotations dans la journée entre la réserve de El Rosario (une des plus grandes et faciles d’accès) et le village. La réserve se trouve plus haut dans la montagne à une dizaine de kilomètres et on y est assez rapidement. Attention à bien guetter la camionnette de retour, le chauffeur oublie parfois de revenir, parole de touriste oubliée sur la route. La réserve est beaucoup plus grande que celle de Valle de Bravo et regroupe beaucoup plus de papillons, par contre, il y a plus de touristes.

Cette fois encore, il faut monter un peu (pour atteindre environ 3000 mètres) pour admirer une explosion de tons orange, à pied à cheval, mais toujours avec un guide. Tous les chevaux étant déjà pris, c’est à pied que nous sommes montés et j’ai maudit mon manque d’entraînement, car finalement 1 heure de montée à cette altitude, pour une banlieusarde qui dépasse rarement les 100 mètres au-dessus de la mer, ça essouffle, et c’est le moins qu’on puisse dire. Mais faisant fi de la souffrance (traduction : en m’arrêtant tous les trois pas et en soufflant de façon fort féminine comme un bœuf), je montai, légère et gracieuse (je vous passe la traduction) jusqu’à atteindre enfin notre objectif, le souffle court. Et ce n’est pas juste à cause de l’effort et de l’altitude que j’avais le souffle coupé, mais parce que le spectacle était simplement extraordinaire. Littéralement des millions de papillons nous entouraient volant dans tous les sens, tapissant le sol, recouvrant les arbres.

Ici également, c’est accompagné par un guide que l’on se rend sur les lieux. Il s’agit souvent de jeunes hommes, fils de paysans qui gagnent un peu d’argent de cette façon. Le reste de l’année ils se consacrent à un peu d’élevage et de culture maraîchère, et beaucoup rêvent de partir de l’autre côté (entendre aux Etats Unis), comme ce cousin, ce frère ou ce père qui a réussi là-bas. Une autre migration, vers le nord cette fois et qui malheureusement est beaucoup moins magique et mystérieuse que celle des papillons. Les réserves se trouvent sur des ejidos, des terres communautaires, et ce sont les paysans qui travaillent ces terres qui les font fonctionner. Certains développent des activités d’écotourisme et des campements avec des cabanes assez basiques, une occasion de participer en tant que touriste, de faire en sorte que notre passage ait un impact positif et profite directement aux habitants. Toutes les réserves ne sont pas ouvertes au public. Certaines sont de véritables sanctuaires où les papillons ne sont pas dérangés par l’Homme qui se charge malgré tout de couper les arbres, réduisant chaque fois plus la superficie des forêts. En visitant ces lieux et en rendant leur protection plus rentable pour la population que l’exploitation du bois, il est possible que la logique s’inverse un jour.

La réserve El Rosario

La réserve El Rosario

L'effet papillon
L'effet papillon
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Des papillons partout
Des papillons partout
Des papillons partout

Des papillons partout

À la fin de l’hiver, en mars, les papillons monarques repartent vers le nord. Il faudra cette fois plusieurs générations de papillons pour traverser le continent avant de revenir l’hiver suivant. Comme eux, je reviens toujours au Mexique !

On raconte qu'un battement d'aile de papillon peut provoquer un ouragant à l'autre bout du monde, je n'ose même pas imaginer ce que provoque une telle quantité de papillons...

Je vous laisse méditer cette considération hautement philosophique et je vous dis à bientôt pour de prochaines aventures à la découverte du pays et de ses curiosités.

L'effet papillon
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K
Hola que padres fotos y muy buenos los artículos realmente siento el calor y los olores de México
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H
Muchas gracias, me alegro que le guste, es justo lo que busco, compartir lo bonito de México. Hasta luego!

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